La tentative de l'océan...
S'approcher de la mer, sentir le sable se défiler sous la plante des pieds, l'eau est froide. Avancer jusqu'à ce que l'ourlet de la robe bleue achetée pour l'occasion se colle aux mollets, c'est fait. Continuer, le corps se rebelle, déjà les picotements de la chair de poule monte vers les cuisses. La sensation n'est pas agréable, continuer pourtant... Le ventre n'est pas encore dans l'eau, alors qu'on voudrait y aller jusque par dessus la tête. On n'avait pas penser à ce détail quand on a acheté la robe bleue : le corps refuse ce que demande la tête. Quelqu'un a dit un jour : elle est triste. La tête est triste oui, mais pas le corps, il refuse d'avancer pour s'immerger jusque par dessus la tête.
Reprendre le contrôle de soi, tenter d'avancer malgré tout, malgré le corps, ne pas s'arrêter pour l'écouter, n'écouter que la tête. Un enfant arrive, tout en rires et éclaboussures, surprise, écart, esquive...
Alors, rebrousser chemin en remontant par les étiers formés par la mer qui se retire. Marcher, le nez vers la terre pour surprendre de tout petits crabes qui s'ensablent à une vitesse déconcertante.
Tout à coup, lever les yeux pour voir à qui appartiennent les pieds géants plantés en face, dans une flaque.
- J'ai eu peur pour vous tout à l'heure, dit l'homme.
- Il ne fallait pas, répond la tête, tandis que le corps se met à trembler imperceptiblement. Elle est trop froide...